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Espagne

Le changement climatique en Espagne : Comment les cigognes ont renoncé à migrer pour vivre des déchets.

Changement climatique en Espagne : Comment les cigognes ont renoncé à migrer pour vivre des déchets.

De plus en plus de cigognes font halte en Espagne, où elles trouvent une nourriture abondante dans les décharges. Cela leur permet d’éviter une dangereuse traversée du détroit de Gibraltar entre la pointe sud de l’Espagne et le nord de l’Afrique. Une traversée d’à peine 14 kilomètres au-dessus de la mer, mais très exigeante en raison des vents violents. (Photo de PIERRE-PHILIPPE MARCOU / AFP)

Les oiseaux aux longues pattes ont traditionnellement volé de toute l’Europe vers les pâturages africains pour l’hiver et sont revenus au printemps.

Mais la nourriture abondante trouvée dans les décharges, combinée à un temps plus chaud, fait qu’un nombre croissant de cigognes sautent ce voyage ardu et restent en Espagne pour l’hiver.

“Pour nous, elles font partie du paysage”, a déclaré Carlos Pinto, agent d’assainissement dans une décharge à Pinto, à quelque 30 kilomètres (18 miles) au sud de Madrid.

La décharge reçoit entre 200 et 300 tonnes de déchets alimentaires par jour et les cigognes se dirigent immédiatement vers les zones “où il y a des ordures fraîches”, a-t-il ajouté.

La scène se répète dans toute l’Espagne, de nombreuses cigognes choisissant de nicher près des décharges où elles vivent toute l’année.

À Alcala de Henares, ville natale de l’auteur de “Don Quichotte”, Miguel de Cervantes, près de Madrid, les cigognes blanches sont devenues un symbole de la ville tant elles sont nombreuses.

“Où que vous regardiez, il y a des cigognes”, a déclaré Almudena Soriano, vétérinaire de la ville.

Les nids de cigognes couronnent les clochers de l’Alcala et le bruit qu’elles font avec leurs longs becs peut être entendu dans toute la ville.

En 1970, la ville ne comptait que dix nids de cigognes. Un recensement effectué en 2021 a permis de trouver 109 nids – soit plus de dix fois plus – qui abritaient jusqu’à 300 cigognes.

Des centaines de cigognes se tiennent sur une décharge dans la banlieue de Pinto, près de Madrid, le 14 juillet 2022. (Photo de PIERRE-PHILIPPE MARCOU / AFP)

Un buffet d’ordures

Soriano estime qu'”environ 70 % des cigognes ne migrent plus” vers l’Afrique, notamment en raison de la nourriture facilement disponible qu’elles trouvent en Espagne dans les décharges.

Cela leur permet d’éviter la dangereuse traversée du détroit de Gibraltar séparant l’Espagne du Maroc, qui ne mesure que 14 kilomètres (neuf miles) mais est souvent battu par des vents violents.

“Beaucoup meurent en chemin. Les cigognes adultes qui ont déjà fait le voyage ne veulent pas répéter l’expérience”, a déclaré Soriano.

“Et comme elles se déplacent pour trouver de la nourriture, une décharge ouverte est pour elles un buffet à volonté. Il n’y a plus besoin de partir.”

Un recensement effectué en 2020 par SEO Birdlife a trouvé 36 217 cigognes blanches en Espagne.

Avant, l’Espagne n’était qu’une étape dans la migration annuelle des oiseaux vers l’Afrique, mais désormais un nombre important de cigognes blanches passent l’hiver dans le pays, selon l’ONG.

Cela inclut les cigognes nées en Espagne ainsi que celles qui viennent de pays européens plus au nord comme le Danemark, l’Allemagne et les Pays-Bas.

Certaines cigognes retournent en Europe du Nord après l’hiver, tandis que d’autres restent en permanence en Espagne.

Les jeunes cigognes ont encore l’instinct de migrer vers l’Afrique mais elles font le voyage sans leurs parents, a déclaré l’ornithologue Blas Molina de SEO Birdlife.

Ce qui n’était qu’une étape dans leur migration est devenu leur destination. (Photo de PIERRE-PHILIPPE MARCOU / AFP)

Changement climatique

Si la facilité de trouver de la nourriture dans les décharges est la principale raison pour laquelle les cigognes ont cessé de migrer, c’est aussi “probablement dû à la tendance à des températures plus élevées” causée par le changement climatique, a indiqué l’ONG dans un récent rapport.

Les cigognes adultes restent “un peu plus au nord” dans la péninsule ibérique alors qu’auparavant elles s’arrêtaient dans la région du sud-est de l’Estrémadure et de l’Andalousie au sud, a déclaré Molina.

Le changement des habitudes migratoires de la cigogne est un exemple clair des “effets de l’activité humaine sur la biodiversité”, a-t-il ajouté.

La municipalité de Pinto envisage de couvrir son site de décharge pour empêcher les cigognes d’avaler du plastique et d’autres éléments potentiellement dangereux. Si elle le fait, les cigognes pourraient partir.

Alcala a fermé sa décharge l’année dernière, mais a installé des stations d’alimentation géantes pour s’assurer que les cigognes aient assez à manger et restent dans la ville.

Le projet semble fonctionner puisque la population de cigognes de la ville est restée stable.

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