Une exposition à Rome présente les gribouillages d’artistes célèbres à travers les âges

La Villa Médicis de Rome présente cette facette longtemps ignorée de la production artistique dans une nouvelle exposition couvrant la période de la Renaissance à nos jours.

Intitulée “Scribbling and Doodling – From Leonardo da Vinci to Cy Twombly”, cette collection inhabituelle de près de 300 œuvres originales va du ludique et du fantaisiste au transgressif et au politique.

Elle met en lumière de délicieuses découvertes qui n’ont jamais été destinées au public, certaines se trouvant même dans les endroits les plus inattendus.

Les panneaux de bois du majestueux “Triptyque de la Madone” de Giovanni Bellini cachent au dos un monde de dessins “qui n’ont rien à voir avec le recto”, explique à l’AFP Francesca Alberti, l’une des commissaires de l’exposition.

En observant attentivement, on peut distinguer des figures superposées esquissées sur le bois brut, l’une portant une mitre d’évêque et grimaçant de façon grotesque.

“Ce que nous montrons dans cette exposition, c’est toute une série de dessins où la main de l’artiste s’est libérée.”

Dessins d’enfants

Que ce soit sur les murs des ateliers d’artistes, sous les fresques ou dans les marges d’autres dessins, les gribouillages et les esquisses comprennent des figures hors de proportion, des rendus grossiers de têtes et de corps, des caricatures comiques et des lignes, des gribouillages et des hachures bancales.

Ces “gestes graphiques expérimentaux, transgressifs, régressifs ou libérateurs”, comme les décrit le catalogue, ne sont pas soumis aux règles et aux contraintes de l’art académique et rappellent les gribouillages des enfants.

“Il m’a fallu toute une vie pour apprendre à dessiner comme eux”, disait Pablo Picasso à propos de la fraîcheur et de la créativité de l’art des enfants.

Moins rigides et plus spontanées, les œuvres représentent la face cachée du talent des artistes, plongeant le visiteur au cœur du processus de création.

L’exposition ignore délibérément la chronologie et mélange allègrement les époques, proposant de nouvelles connexions entre les maîtres de la Renaissance, de Léonard de Vinci et Michel-Ange aux artistes modernes et contemporains comme Jean-Michel Basquiat, Jean Dubuffet, Pablo Picasso et Cy Twombly.

Poutine dehors

Dans le large escalier en pente douce de la villa, construit à l’origine pour accueillir les chevaux, se déroule “un dialogue entre les dessins de la Renaissance et les dessins contemporains”, avec des croquis du XVIe siècle juxtaposant des gribouillages réalisés quatre siècles plus tard.

Une “Vierge à l’Enfant” du maniériste Taddeo Zuccari, qui vécut de 1529 à 1566, “se décompose et s’effiloche en toute une série de lignes griffonnées comme si, en fait, la main de l’artiste était complètement libre”, a déclaré Alberti.

Ces croquis et ces gribouillages étaient importants pour les artistes, explique Alberti, car ils leur permettaient de “libérer la tension accumulée pendant le dessin”.

“Il faut aussi se libérer du dessin pour être capable de dessiner à nouveau avec la même énergie”, a-t-elle ajouté.

Les visiteurs de l’exposition sont eux-mêmes invités à libérer leur créativité intérieure dans une salle gris anthracite, avec des craies fournies.

L’actualité a inspiré bon nombre des gribouillages que les visiteurs ont laissés sur les murs. Les slogans “Poutine dehors !” et “Vive la paix” apparaissent à côté d’une représentation du drapeau jaune et bleu de l’Ukraine.