Tout perdu : Des Ukrainiens partent vers une nouvelle vie en Suède

Des milliers d’Ukrainiens sont arrivés dans les villes de Trelleborg, Ystad, Karlskrona et Nynäshamn par la mer depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie il y a trois semaines.

Ludmila et ses deux filles tirent leurs valises dans le terminal du ferry après avoir débarqué sous le soleil printanier de Nynäshamn, une ville située à une heure au sud de Stockholm.

Là, avec 500 autres passagers composés principalement de femmes et d’enfants, elles sont accueillies par des bénévoles désireux de leur donner des produits de première nécessité.

Les tables voisines sont empilées avec des bouteilles d’eau, des sandwiches, de la nourriture pour bébé et des produits sanitaires. Même de la nourriture pour chiens et chats est disponible pour ceux qui fuient avec des animaux de compagnie.

Des poussettes et des landaus donnés sont alignés contre un mur, et une table est couverte de jouets en peluche pour les enfants. Ludmila et ses filles ont fui leur maison de Kharkiv, la deuxième plus grande ville d’Ukraine, après que la Russie a commencé à bombarder la ville le 28 février.

“Les bombardements ont commencé, l’alarme anti-aérienne s’est déclenchée. Nous avons rapidement fait nos bagages pour prendre le train”, raconte à l’AFP Ludmila, qui travaillait dans une usine de chaussures.

Alors qu’elles se dirigeaient vers la gare, elles ont entendu le bruit des explosions au loin, se souviennent Anna, 20 ans, et sa sœur Anastasia, 19 ans.

“Mais c’était loin de nous et heureusement nous n’avons pas été touchés”, dit Anna, une programmeuse.

“A la gare de Kharkiv, il y avait beaucoup de monde. Et quand nous sommes arrivés à Lviv, il y avait encore plus de monde. Nous sommes arrivés à trois heures du matin et nous avons attendu dans la rue un train pour la Pologne”, ajoute-t-elle.

Ils n’avaient aucun plan pour savoir où aller après cela.

Finalement, ils ont choisi la Suède, un pays autrefois connu pour sa politique généreuse envers les réfugiés et qui a accueilli le plus grand nombre de demandeurs d’asile par habitant en Europe pendant la crise migratoire de 2015.

Un abri en Suède

Plus de trois millions de personnes ont fui l’Ukraine depuis le début de l’invasion, selon l’agence de migration de l’ONU, l’OIM, dont 1,8 million vers la Pologne.

Jusqu’à présent, la compagnie de ferry Polferries a transporté gratuitement 5 600 Ukrainiens de Pologne à Nynashamn. D’autres compagnies de ferries en ont transporté des milliers.

L’Agence suédoise des migrations a estimé qu’au moins 4 000 réfugiés ukrainiens arrivaient en Suède par jour, le nombre réel étant probablement beaucoup plus élevé car tous ne sont pas enregistrés immédiatement à leur arrivée.

De longues files d’attente se sont formées devant les bureaux de l’Agence des migrations en Suède, certains demandant aux gens de faire demi-tour et de revenir un autre jour.

Les autorités se démènent pour mettre en place des centres d’accueil et des logements pour les dizaines de milliers de personnes attendues.

L’Agence des migrations a élaboré des scénarios de planification pour l’aider à se préparer à l’arrivée de 27 000 à 212 000 Ukrainiens entre mars et juin.

Ce chiffre supérieur dépasserait le record de 163 000 demandeurs d’asile que la Suède – un pays de 10 millions d’habitants – a accueilli pendant la crise migratoire de 2015.

Le pays a depuis durci sa politique migratoire, invoquant la pression exercée sur ses systèmes d’immigration et d’intégration.

Entre autres mesures, il n’accorde désormais que des permis de séjour temporaires. Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le gouvernement suédois a souligné que les pays de l’UE devaient cette fois-ci faire davantage pour partager le fardeau.

Pour Ludmila, qui vient de respirer pour la première fois en Suède, l’avenir est incertain. Son esprit est encore tourné vers le passé et ce qu’elle et ses filles ont laissé derrière elles.

“Nous avons perdu notre maison, nos emplois, nos vies, le peu que nous avions là-bas. Vous voyez, les gens construisent quelque chose, aspirent à faire ou à être quelque chose dans la vie, mais nous avons tout perdu.”