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Autriche

La violence contre les femmes à l’honneur en Autriche après d’horribles meurtres

Les militants appellent les politiciens à intensifier leurs actions contre la violence sexiste à la suite d’une série de fémicides en Autriche, un petit pays où les crimes violents sont généralement rares.

Peint en rouge sang sur un mémorial improvisé à Vienne, le numéro 31 est un rappel brutal d’un sinistre bilan : les femmes tuées par des hommes en Autriche l’année dernière.

Après que plusieurs cas particulièrement horribles parmi les meurtres aient été largement rapportés dans les médias, la question du fémicide est désormais sous le feu des projecteurs.

“C’est une situation vraiment dramatique… C’est incompréhensible”, a déclaré à l’AFP Maria Rösslhumer, directrice exécutive d’un réseau de refuges pour femmes.

Les chiffres ont fluctué au fil des ans, mais entre 2010 et 2020, 319 femmes ont été tuées en Autriche, principalement par leurs partenaires ou ex-partenaires masculins, avec un record de 43 victimes en 2019, selon une étude commandée par
le gouvernement l’année dernière.

En 2018, l’Autriche figurait parmi les trois membres de l’Union européenne à signaler les taux les plus élevés de fémicide dont l’auteur était un membre de la famille ou un parent, selon les données d’Eurostat.

Cependant, l’activiste Ana Badhofer dénonce toujours un “manque d’indignation” face au fémicide, affirmant que son groupe a lancé le mémorial sur un marché de Vienne par frustration. Elle a cité l’exemple de novembre d’une femme battue à mort avec une batte de baseball.

Le nombre '31' est vu sur un mur commémorant le nombre de fémicides en Autriche en 2021, à Vienne le 17 janvier 2022. - Peint en rouge sang sur un mémorial improvisé à Vienne, le nombre 31 est un rappel brutal d'un sombre bilan : les femmes tuées par des hommes en Autriche l'année dernière. Après que plusieurs cas particulièrement horribles parmi les meurtres aient été largement rapportés dans les médias, la question du fémicide est désormais sous le feu des projecteurs. Dans un petit pays riche où les crimes violents sont généralement rares, un débat public a commencé, galvanisant les militants et obligeant les politiciens à agir.

Photo : Andrea Klamar-Hutkova/AFP

C’était une affaire particulièrement choquante en mars dernier qui a mis la question au premier plan.

Une femme de 35 ans, identifiée uniquement comme Nadine W., a été battue et étranglée avec un câble dans un bureau de tabac de Vienne par son ex-partenaire de 47 ans. Il a ensuite versé de l’essence sur elle et l’a incendiée avant de quitter le magasin et de verrouiller la porte. Elle a été sauvée mais est décédée un mois plus tard des suites de ses horribles blessures.

En avril, le propriétaire d’un magasin de bières artisanales, âgé de 43 ans – précédemment accusé par un politicien de l’avoir harcelée avec des messages obscènes – a été arrêté pour avoir tué son ancien partenaire, une mère de deux enfants âgée de 35 ans.

Les deux hommes ont été condamnés à perpétuité et envoyés dans des établissements pour délinquants souffrant de troubles mentaux.

De la France au Mexique, de l’Afrique du Sud à la Turquie, les militants ont tiré la sonnette d’alarme sur le féminicide et la violence contre les femmes, souvent par le biais de rassemblements massifs. En Autriche, le gouvernement de coalition vient d’allouer 25 millions d’euros
(28 millions de dollars) cette année, parmi plusieurs initiatives visant à lutter contre le problème.

Les meurtres ont suscité une certaine introspection dans le pays alpin, où plus de femmes que d’hommes sont tuées, selon les chiffres d’Eurostat, ce qui en fait une exception dans l’UE.

Rösslhumer a souligné un “manque de respect et un mépris sociétaux tangibles envers les femmes” auxquels il fallait s’attaquer.

Karin Pfolz a une amère expérience de première main de telles attitudes. Au cours de la décennie où elle a été coincée dans un mariage violent, elle s’est souvent sentie isolée, a-t-elle déclaré à l’AFP.

“Vous n’avez personne à qui parler, car il y a tellement de honte et de stigmatisation sociale”, a déclaré Pfolz, qui parle maintenant de ses expériences dans les écoles.

La criminologue Isabel Haider, de l’Université de Vienne, a déclaré que les agents des forces de l’ordre devaient également être formés pour réagir avec plus de sensibilité, car de nombreuses femmes ont le sentiment que “la police ne les prend pas au sérieux”.

C’est la peur de ne pas être cru qui a empêché Pfolz de contacter la police. Lorsqu’elle a finalement traduit son mari en justice, elle a déclaré que l’attitude de la juge – une femme – renforçait le sentiment qu’elle n’était pas crue.

Lors d’une récente visite en Autriche, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatovic, a appelé à « une approche ambitieuse et globale » pour « protéger les droits des femmes et l’égalité des genres ».

Elle a noté que l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes en Autriche – un peu moins de 20 % en 2019, selon Eurostat – est l’un des plus importants de l’UE.

“Quand vous partez, tout ce que vous avez est un sac en plastique dans une main et un enfant dans l’autre”, a déclaré Pfolz. « Vous devenez un réfugié dans votre propre pays », a-t-elle ajouté.

Mais Pfolz sait que même lorsque les femmes sont en train de se construire une nouvelle vie, elles sont souvent menacées par d’anciens partenaires. Son ex-mari venait dans sa nouvelle maison et elle se souvenait avoir dû « s’enfermer dans une pièce avec mon fils parce que nos vies étaient en danger ».

Bien qu’elle reconnaisse que la question de la violence à l’égard des femmes occupe désormais une place plus importante à l’ordre du jour, Pfolz déplore toujours que “presque personne ne considère cela comme un crime – jusqu’à ce que cela se transforme en meurtre”.

Cette année n’avait que quelques jours avant qu’un autre cas choquant ne fasse la une des journaux – une femme de 42 ans abattue d’une balle dans la tête et tuée par son mari à leur table de dîner.

De Denise Hruby

Si vous êtes victime de violence domestique, un guide en anglais des différents services de soutien proposés en Autriche est disponible auprès du gouvernement fédéral en cliquant ici. La ligne d’assistance aux femmes contre la violence est le 0800 222 555.

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